NEWSLETTER 01
Mars 2023
Mars 2023
Le Projet National Dolmen est un programme de recherche collaboratif qui rassemble 61 partenaires du domaine du génie civil (maîtres d’ouvrages, ingénieries, entreprises de travaux, industriels, organismes de recherche) et est administré par l’IREX.
Son objectif est de progresser dans la compréhension du comportement des ouvrages d’art en maçonnerie et de transférer les résultats de la recherche à la profession pour améliorer l’évaluation et la maintenance du patrimoine existant et rétablir la maçonnerie dans le catalogue des techniques de construction contemporaines.
Le projet a été lancé en juillet 2021 et des actions ont été initiées dans tous les axes de travail ; n’hésitez pas à vous rapprocher des pilotes pour participer aux réflexions menées dans les différents groupes de travail. Cette newsletter vous permet de suivre l’avancement des actions lancées lors de la première tranche du projet.
Le patrimoine des ouvrages en maçonnerie est considérable, véritable héritage de savoir-faire des siècles passés. Ils sont très appréciés pour leur résilience, leur capacité à s’adapter aux nouveaux usages, mais ils vieillissent. Leur préservation présente un enjeu national capital, tant pour des raisons financières qu’environnementales.
Les retours d’expériences indiquent que l’expertise en la matière s’est considérablement affaiblie depuis quelques décennies, la cohérence des réponses de l’ingénierie tient plus à des approches individuelles de l’ingénieur, souvent calquées sur des outils et des connaissances acquises sur des matériaux modernes, mais non reproductibles sur le comportement de la maçonnerie.
De nombreux gestionnaires ayant l’expérience de ce matériau ont alerté sur ce dysfonctionnement, où les traitements massacraient parfois les conceptions d’origine en dégradant les modes de fonctionnement. Il était nécessaire de redonner une cohérence dans la compréhension du comportement des constructions de génie civil en maçonnerie pour harmoniser au plan national les interventions de l’ingénierie sur ces sujets.
Par ailleurs, la maçonnerie reste une technique adaptée pour la construction neuve sur certains territoires où la matière première est largement disponible, avec des coûts raisonnables, quand sont pris en compte les qualités environnementales à faible empreinte carbone et les qualités liées au développement durable (impact sur l’emploi, pérennité…).
C’est sur ces bases qu’est né le projet de recherche Dolmen, pour proposer des outils adaptés et efficaces pour évaluer le patrimoine existant et rétablir la maçonnerie dans le catalogue des techniques de construction contemporaines.
Le programme de recherche, soutenu par le Ministère de la Transition Ecologique et de la Cohésion des Territoires, a été lancé en juillet 2021, avec un budget de 2,1 millions d’euros, porté par une soixantaine de contributeurs publics et privés. Le développement est architecturé autour de 5 axes : caractérisation du matériaux composite, évaluation des structures existantes, constructions neuves et innovantes, maîtrise des risques et incertitudes, analyse développement durable.
De nombreuses collectivités contribuent pour proposer des échantillons de patrimoines, dont certains serviront de base au programme de recherche.
2022 a lancé près de 15 lettres de commandes d’actions de recherche auprès de chercheurs et d’organismes ciblés. Par ailleurs, de prochaines contributions des partenaires seront attendues dès 2023, dans le cadre des retours d’expériences de calcul de structure, sur l’ébauche qui sera proposée.
Dolmen est en marche et a pour ambition de répondre à un réel besoin, grâce aux contributions à venir, en permettant aux opérateurs de terrain d’exploiter pleinement et efficacement les résultats de cette recherche.
L’objectif de l’axe transversal « ouvrages de référence » est double :
Dans un premier temps, une centaine de gestionnaires ont été contactés et des entretiens individuels ont pu être menés avec une douzaine d’entre eux, tandis que d’autres répondaient à un questionnaire électronique. Au cours de ces échanges, qui ont parfois duré plusieurs heures, ont été abordées des questions liées à leur parc d’ouvrages en maçonnerie (nature, âge, état, usage), à leurs pratiques de gestionnaire et aux principales difficultés qu’ils
Le paysage français des gestionnaires d’ouvrages en maçonnerie a été largement sollicité, parmi lesquels l’ensemble des conseils départementaux français, les métropoles et quelques communautés urbaines majeures, les services de l’Etat compétents, les réseaux ferrés, les gestionnaires de ports et de voies navigables. Plus d’une centaine de gestionnaire a répondu à cette enquête, ce qui permettra d’ancrer ce projet dans la réalité des gestionnaires d’ouvrage.
La liste d’ouvrages compte près de 70 entrées, essentiellement des ouvrages en maçonnerie de pierre (un peu de briques). Les ponts voûtes, monoarche ou à plusieurs travées, représentent les deux tiers des effectifs, les murs de soutènement un petit quart, et deux tunnels et un quai ajoutent un peu de diversité. Ces ouvrages sont dans des états très variés.
Les animateurs de l’axe O tiennent à remercier vivement les gestionnaires et autres professionnels qui ont accordé de leur temps pour participer aux entretiens, rassembler, synthétiser et transmettre des informations sur leur patrimoine.
Développer un outil de calcul de structures maçonnées adapté aux besoins de la profession est l’un des objectifs forts du PN Dolmen et de l’axe 2 « Évaluation des structures existantes ». Cet outil doit permettre aux différents acteurs d’appréhender l’évaluation des principales typologies de structures (ponts, voûtes, murs de soutènement, etc.) pour lesquelles il est usuel de rencontrer des problématiques de maintenance, de diagnostic structurel, de renforcement et/ou de justification.
La première tranche du PN a cherché à dresser un panorama objectif, par le biais d’une enquête menée auprès des participants du PN Dolmen, des écueils rencontrés majoritairement autour de la problématique du diagnostic d’ouvrages d’une part et sur les pratiques classiquement mises en œuvre pour y répondre d’autre part.
Cette enquête a permis de mettre en évidence des attentes très disparates entre les participants du PN sur ce que devait être cet outil. Toute la difficulté est ensuite de définir le périmètre de l’outil pouvant apporter des réponses aux principaux besoins identifiés. Cela a été fait en Copil sur la base des réflexions menées lors de cette première tranche des travaux.
Le périmètre de l’outil à développer a été arrêté définitivement. Plus généralement, la philosophie de fonctionnement de l’outil d’une part et une stratégie de développement évolutive de l’outil d’autre part ont été actées. Un partenariat avec le Cerema, développant le logiciel VOUTE largement utilisé pour le diagnostic de ponts, est par ailleurs en passe d’être conclu afin d’accompagner le développement de la plate-forme de calcul.
L’outil de calcul qui sera développé pour le PN est un logiciel de modélisation multi-approches qui sera accessible en ligne et qui permettra d’offrir aux utilisateurs différents niveaux d’évaluation / modélisation. Parmi ces niveaux d’approches, on distinguera :
L’outil permettra notamment une utilisation du logiciel VOUTE via une interface en ligne. Cette interface permettra de nourrir un espace paramétrique dédié. Les autres approches de modélisation pourront être mises en œuvre avec cette même interface afin de réaliser des diagnostics à différents niveaux (croisement des principales données avec les abaques usuels et/ou modélisations avancées).
Au-delà de son rôle premier qui restera de réaliser des évaluations de structures, la plate-forme développée pourra être utilisée comme outil de formation afin de faire découvrir la spécificité des structures en maçonnerie et la gamme variée des approches, des calculs empiriques aux approches non standards. Elle pourra aussi constituer un outil de support à la recherche en permettant d’investiguer, de manière simplifiée et automatisée, la question de la sensibilité des résultats à la variabilité des principales entrées des modèles, en lien avec l’axe 4 « Maîtrise des incertitudes et des risques » du PN. L’utilisation de l’outil au travers de larges études paramétriques devrait enfin permettre de produire des données numériques d’intérêt, dont l’analyse pourrait conduire à terme à la construction de nouveaux abaques numériques qui pourront être à leur tour intégrés à l’outil.
La mise en œuvre de modèles avancés va de pair avec la nécessité de caractériser finement, sinon le comportement des éléments constitutifs de la maçonnerie (pierres/blocs – mortier/joints), celui du matériau composite « maçonnerie » (pierre+mortier). Ainsi, l’outil sera interopérable avec une base de données matériaux adaptée aux approches de modélisation utilisées dans l’outil afin que l’utilisation des modèles avancés puissent être garantie. La description de cette base de données fait l’objet d’une fiche action portée par l’axe 1 « Caractérisation du matériau composite ».
Le développement de ces outils s’appuiera sur des benchmarks qui mettront en œuvre les approches de modélisations retenues sur des cas réels. Les enseignements tirés de ces confrontations permettront d’affiner le déploiement des approches de modélisation retenues d’une part et permettront d’autre part d’évaluer l’écart entre les résultats obtenus avec l’outil et ceux obtenus avec d’autres approches, des méthodes couramment employées dans les bureaux d’études aux approches exploratoires des laboratoires de recherche.
N’hésitez pas à vous rapprocher des animateurs de l’axe 2 si vous souhaitez participer aux développements de l’outil ou aux benchmarks des méthodes de calcul que vous utilisez régulièrement.
La stratégie de développement proposée s’intéressera dans un premier temps à l’évaluation des ponts et des murs de soutènement en maçonnerie. Cette stratégie sera ensuite adaptée et transposée pour permettre au besoin le diagnostic d’autres typologies de structures.
L’intérêt de la maçonnerie pour la réalisation d’ouvrages de génie civil a été mis en évidence, notamment pour l’avantage environnemental qu’elle procure par rapport à l’utilisation de matériaux industriels. Une Analyse de Cycle de Vie (ACV) a permis de comparer l’impact environnemental du pont en maçonnerie de Chaldecoste, construit en 2011 à Ventalon-en-Cévennes (Lozère), à celui d’une structure équivalente en béton. Pour tous les impacts environnementaux évalués, le pont en maçonnerie s’est révélé plus performant.
Afin de généraliser la réalisation de bilans environnementaux d’ouvrages en maçonnerie en vue de valoriser leur intérêt, l’accès à des données environnementales représentatives de ces matériaux constitutifs est primordial. Aussi, un questionnaire de collecte de données à destination des carrières a été réalisé. Pour ce faire, il a été nécessaire de se familiariser avec les différentes techniques et les différents outils employés dans l’extraction, l’équarrissage et le sciage de la pierre de carrière et d’identifier le cycle de vie habituel des produits en pierre de carrière, de l’extraction de la pierre jusqu’au transport des produits finis au client. Ces étapes ont permis de réaliser le questionnaire le plus adapté.
Ce questionnaire commence à être largement diffusé ; un travail équivalent à destination des producteurs de briques et de chaux est prévu. N’hésitez pas à relayer cette démarche auprès des producteurs de matériaux susceptibles d’être intéressés. Nous espérons des premiers résultats pour la fin du premier semestre 2023.